Le dispositif de partage de la valeur s'ouvre aux petites entreprises

BOURSE ET ENTREPRISES

5/20/20253 min temps de lecture

three men laughing while looking in the laptop inside room
three men laughing while looking in the laptop inside room

Depuis le 1er janvier 2025, une révolution discrète mais structurante est en marche dans les PME françaises. Désormais, les entreprises de 11 à 49 salariés doivent elles aussi mettre en place un dispositif de partage de la valeur avec leurs employés. Ce qui relevait jusqu’alors d’une logique incitative devient une obligation légale, traduisant un changement profond dans la philosophie de la rémunération salariale en France.

Une obligation législative pour les entreprises rentables

Adoptée dans le cadre de la loi du 29 novembre 2023, cette nouvelle obligation vise les entreprises employant entre 11 et 49 salariés, ayant réalisé un bénéfice net fiscal d’au moins 1 % de leur chiffre d’affaires pendant trois exercices consécutifs. Si cette condition est remplie, elles doivent instaurer au moins un des dispositifs suivants :

  • un accord de participation (obligatoire pour les entreprises de plus de 50 salariés),

  • un accord d’intéressement,

  • le versement d’une prime de partage de la valeur (PPV),

  • ou une combinaison de ces mécanismes.

Ce tournant vise à étendre le modèle de redistribution des résultats à un tissu d’entreprises plus large, jusque-là souvent exempté de telles démarches en raison de leur taille ou de leur structure. Il s'agit clairement d’une montée en puissance des logiques d’épargne salariale comme outil de cohésion sociale et d’alignement des intérêts.

L’épargne salariale comme pilier de rémunération

Selon les dernières données de l'Association française de la gestion financière (AFG), 13 milliards d’euros ont été versés en 2024 aux salariés au titre de la participation, de l’intéressement et des primes liées à la performance de l’exercice 2023. Ce flux témoigne de l’importance croissante de l’épargne salariale comme complément stratégique de rémunération.

Les salariés ont alors deux choix :

  1. Percevoir immédiatement les sommes, les soumettant ainsi à l'impôt sur le revenu et aux cotisations sociales.

  2. Les placer sur un plan d’épargne salariale, généralement un Plan d’Épargne Entreprise (PEE) ou un Plan d’Épargne Retraite collectif (PERCO ou PER collectif), souvent bonifié par un abondement employeur.

Un enjeu d’arbitrage pour les salariés

Ce choix n’est pas neutre : 30 % des salariés optent actuellement pour un versement immédiat. Mais pour ceux qui peuvent différer leur consommation, placer ces primes peut s’avérer plus avantageux, surtout si leur entreprise propose un abondement. Ce levier est puissant : l’abondement peut aller jusqu’à 300 % des sommes investies, dans la limite de 3 768 € par an sur un PEE et 7 536 € sur un PER collectif.

En fonction de l’accord d’entreprise, les règles d’abondement varient : certaines sociétés abondent uniquement le PEE, d’autres le PER, voire les deux, dans des proportions spécifiques. Lire son accord d’entreprise devient alors une démarche clé pour optimiser son rendement.

Disponibilité et fiscalité

L’épargne placée sur un PEE est bloquée cinq ans, sauf cas spécifiques de déblocage anticipé (mariage, acquisition de la résidence principale, rupture du contrat…). Le PER collectif, lui, est en principe bloqué jusqu’à la retraite, avec quelques rares exceptions (achat de la résidence principale, invalidité, décès, surendettement…).

Côté fiscalité, les primes investies dans ces dispositifs bénéficient généralement d’une exonération d’impôt sur le revenu, à condition de rester investies. À l’inverse, le versement immédiat est imposable comme un salaire. Un arbitrage à mener en fonction de sa situation personnelle, de ses besoins de liquidité, de son taux marginal d’imposition, et des aides sociales qu’une hausse de revenu pourrait remettre en cause.

Une nouvelle ère pour les TPE-PME

L’instauration du partage de la valeur dans les petites structures marque une transformation du paysage social de l’entreprise. Les dirigeants de TPE-PME doivent désormais anticiper cette obligation, souvent perçue comme une contrainte administrative supplémentaire, mais qui peut devenir un levier d’attractivité, de fidélisation et de performance.

D’après la Dares, 8,9 millions de salariés étaient concernés par un dispositif de participation, d’intéressement ou d’abondement en 2023. Ce chiffre devrait croître mécaniquement avec l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, élargissant le champ des bénéficiaires dès 2025, pour un effet plein attendu à partir de 2026.